L’art Tshokwe jouit d’un prestige tout à fait justifié. L’inscription au catalogue d’une vente d’un objet d’art Tshokwe est souvent un événement1.
Cette particularité est due au fait que le Tshokwe est sensible au beau et donc à tout ce qui est fait impeccablement, attirant autant par sa beauté que par son utilité. C’est pour cette raison que son art est riche et varié.
En effet, le Tshokwe est un artiste complet dont la production englobe tous les secteurs de la vie et témoigne d’un intense dynamisme intérieur.
Les œuvres d’art esquissent des gestes rares et se regroupent en véritables compositions décrivant de scènes vivantes de la vie quotidienne.
L’une des preuves tangibles est la place de choix qu’occupent ses objets et œuvres d’art au Musée Royal d’Afrique Centrale à Tervuren au Royaume de Belgique qui compte parmi les musts du Monde.
7.1 Art du corps
Les Tshokwe ont un art corporel particulier caractérisé par les tatouages, la coiffure et les ornements de la tête.
7.1.1 Tatouages
L’art du tatoueur Tshokwe se distingue par l’élégance des dessins scarifiés et par l’aspect net discret des reliefs chéloïdiens provoqués2.
Les tatouages se nomment yitoma si le dessin orne le corps et katoma s’il décore une statuette ou un objet.
Ils sont pratiqués, à partir de la puberté, par des spécialistes hommes et femmes.
Beaucoup de ces anciens signes de reconnaissances, rituels et symboliques n’ont plus de nos jours qu’un but décoratif et érotique.
7.1.2 Art du corps
La coiffure kambu (les cheveux), pluriel de lukambu est un autre élément important de la parure.
Autrefois, hommes et femmes portaient approximativement les mêmes.
Cette coquetterie ne se rencontre plus aujourd’hui que chez les femmes, les hommes ayant les cheveux taillés courts.
7.1.3 Ornements de la tête
Ornements de la tête des Tshokwe sont 3:
- l’épingle à cheveux, musako ;
- le rang de perles, kabalo ;
- le bandeau étroit, kaponde ;
- les diadèmes, cipeya ou cypeya mutwe ;
- le chapeau de cérémonie, mutwe wa kayanda ;
- le plumet, sala.
A ces ornements de la tête s’ajoutent la couronne royale, Tshibangula, Ibangula au pluriel qui correspondent au rang et importance hiérarchique de chacun chef.
7.2 Sculpture
La sculpture Tshokwe est puissante et raffinée. Elle reflète les qualités d’un peuple intelligent et dynamique.
Au sujet de l’art Tshokwe, Muhunga renseigne que « les Tshokwe sont habiles à tailler le bois pour en faire des figurines (statuettes) à deux, trois ou quatre têtes appelées Kaponya, au singulier et Tuponya, au pluriel.
Voici les noms des articles fabriqués par nos sculpteurs et artisans :
*/ Tuponya, bois taillé ;
*/ Panda, bois taillé en forme d’assiette profonde dans laquelle les hommes mangent leur nourriture ;
*/ Pitho, porte en bois (naguère, les Tshokwe fabriquaient la porte) ;
*/ Yitwamo ya Khwasa nyi Zunu, nous avons deux sortes de sièges, d’une part, la chaise de table qui s’appelle « Khwasa », et, d’autre part, le fauteuil « Zunu » ;
*/ Tshikanga, natte tissée dont les Tshokwe se servent pour dormir ;
*/ Lwalo, panier plat servant à vanner (tissage dans lequel les femmes conservent la farine) ;
*/ Tshipaya : corbeilles destinées à la conservation de quelque chose ;
*/ Chisoka cha nganda, petite corbeille, ornée de dessins, servant d’assiette ;
*/ Musaka, espèce de corbeille en liane qui sert de bol ;
*/ Kafuko, espèce de corbeille en liane qui sert d’assiette.
7.3 Masques
A propos des masques, il existe deux types : les masques de danses ou des réjouissances populaires et ceux du Mukanda.
7.3.1 Masques des danses ou des réjouissances populaires
Pratiquement, tous les masques de danses sont des sculptures de très bonne qualité et minutieusement faites. Les plus connus sont :
*/ Mwanapwo, la monolisa Tshokwe de renommée internationale ;
*/ Nalulele, qui symbolise aussi la jeune fille ;
*/ Katoyo, l’équivalent masculin de la Mwanapwo qui, parfois, est envoyé pour annoncer, dans son village d’origine, le décès d’une femme mariée dans un autre village, en vue de prévenir toute action de représailles et dont le plus célèbre était Mushilindjindji ;
*/ Ngulu qui symbolise le cochon ;
*/ Nangue qui symbolise la pintade ;
*/ Khanga qui symbolise la perdrix ;
*/ Tshihongo qui a un accoutrement particulier ;
*/ Tshinwawalwa qui symbolise le soulard ;
*/ Mbongo ou Muyinda, un homme dont les jambes sont fixées sur des échasses d’au moins cinq mètres de haut et qui marche avec élégance.
7.3.2 Masques du Mukanda
Les masques du Mukanda sont de véritables chefs-d’œuvre fabriqués avec une attention particulière et dont la forme ainsi que les matériaux répondent à des critères spécifiques.
Ils sont hiérarchisés, selon leur rang et rôle. Il s’agit de :
*/ Tshikungu et Kasha, masques sacrés, symbole de la dynastie de Grands Chefs Tshokwe, à double visage (l’un devant et l’autre derrière), signe non seulement de vigilance, mais de violence et de clairvoyance qui caractérisent et qui doivent caractériser tout Grand Chef. Ils apparaissent uniquement lors de l’initiation des princes, plus précisément les fils et neveux de Mwene Mwatshisenge. A chacune de leurs apparitions, l’aîné (Tshikungu) égorge des chèvres avec une épée à double tranchant (Mukwale) ;
*/ Tshikuza ou Tshitenu (le méchant) qui préside le Mukanda ;
*/ Kalelwa qui représente les ancêtres qui veillent sur la santé et le bien-être des initiés (thundandji) ;
*/ Katwa ou Mulimbula ou encore Ngondo qui pourvoit aux besoins alimentaires des initiés ;
*/ Mulonga (problème), le méchant qui symbolise la force par rapport à tout danger venant du village et qui pourrait affecter les initiés. Il est muni d’un arc-à-flèches sans pointe (Mukhondji) et il est toujours accompagné du masque Sawalingula qui le tient par la main et veille à ce qu’il ne s’attaque pas aux personnes. Il lui arrive de danser aussi devant les femmes;
*/ Tshihewu ou Sawajila ou encore Tshindombe qui annonce l’arrivée d’autres masques de rang supérieur, amuse les mères des initiés et leur donne en termes voilés les nouvelles de leurs enfants qui sont au camp d’initiation (Mukanda).
7.3.3 Masque de guerre
L’histoire rapporte que dans le temps, les Tshokwe avaient un redoutable masque dénommé Tshitelela.
Il pouvait voler comme un avion grâce à la sorcellerie et avait pour mission de rapatrier les Tshokwe pris en otage, en esclavage ou captivité en terres étrangères. Il était très méchant et extrêmement dangereux car, le coût de chacun de ses décollages et atterrissages équivalait des pertes en vie humaine. Sa demeure, c’est le camp de Zemba.